jeudi 17 juillet 2008

Publication : dégradation du temple Ta Keo

Une première publication issue des missions 2006 et 2008 au Cambodge vient de paraître:

Marie-Françoise André, Samuel Etienne, Denis Mercier, Franck Vautier, Olivier Voldoire, 2008 - Assessment of sandstone deterioration at Ta Keo temple (Angkor): first results and future prospects. Environmental Geology. http://dx.doi.org/10.1007/s00254-008-1408-8

Abstract:
A first application of geomorphological methods to the assessment of sandstone deterioration at Angkor is presented. Damage diagnosis was carried out on the first eastern tier of the central pyramid of the 1,000 year-old Ta Keo temple. Methods combine field observations and
measurements at 230 sampling points, high-resolution lasergrammetry and stereophotogrammetry on a 2-m2 test zone, and SEM observations. The first results indicate that decay operates through a synergistic combination of weathering phenomena dominated by scaling and solution, and exhibits a high spatial variability. Percentages of deteriorated
surfaces vary from 17.6 to 93.8%, and average stone recession values from 0.00 to 2.71 cm (minimum) and 0.34 to 5.49 cm (maximum). On the test-zone, stereophotogrammetry and 3D-mapping of the present and reconstructed initial states using lasergrammetry indicate
that erosion scars up to 6 cm deep have formed since 1963.
On the whole, the amount of deteriorated surfaces more than tripled between 1963 and 2008. The degree of implication of salts in stone decay remains unclear for most efflorescences
are composed of calcite (CaCO3), with secondary importance of barite (BaSO4) and gypsum (CaSO4.2H2O). Future prospects aim to evaluate the impact on stone decay of the clearing out of the temple from the forest in the 1920s.

Pendant ce temps, les temples khmers cristallisent de nouveau les tensions politiques entre la Thaïlande et le Cambodge :





lundi 11 février 2008

Tourisme

Veille du départ : journée tourisme. Autour du Tonle Sap le matin, visite d’un village flottant. Les rizières alentours. Le Ta Phrom : un temple qui se bat contre les ficus étrangleurs.Beaucoup d’enfants : la jeunesse de la population cambodgienne nous étonne chaque jour.
Profitez des photos !


Ta Prohm





dimanche 10 février 2008

Mission accomplie

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C’est dans la boîte ! Pas repos dominical pour l’équipe. Malgré un préavis de grève déposé en bonne et due forme auprès de notre patronne, nous avons dû renoncer à l’un de nos acquis sociaux ancestraux pour rejoindre une nouvelle et dernière fois Ta Keo. Cette fois, on a définitivement fait le tour du gros boudin. Franck et Olivier, très confiants, ont même décidé de tester les limites de leur machine ; la question était « combien peut-on faire de scannages sans sauvegarder et sans planter la machine ? » La réponse est 21. A la 22e tentative, le logiciel a planté et toutes les données ont disparu. Autre question : « peut-on tenir une journée sans remplir le réservoir du groupe électrogène ? » La réponse est non. Les marchands du temple sont allés nous trouver un litre d’essence jaune Fanta au Ta Prohm et ont a pu continuer l’acquisition. Bref, comme nous étions finalement en avance, il fallait bien pimenter notre journée… à ce propos, celui qui a planqué la chaussure de Denis au milieu de la jungle a un gage puisqu’on ne l’a pas retrouvée…




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Les enfants et adolescents du Ta Keo se sont montrés plus curieux aujourd’hui et sont venus en fin d’après-midi regarder le fonctionnement du scanner. La mission s’est terminée par l’habituelle photo de groupe. Nan, notre restauratrice, nous a offert quelques spécialités locales avant de partir : des boulettes de viande très goûtues dont la texture kloug a fait l’unanimité.


Demain, on fait relâche : nous allons visiter les villages flottants du Tonle Sap.



samedi 9 février 2008

Toujours le même boudin

Fin du travail sur le Chau Sey Tevodah pour Denis et moi, 450 pierres, 2500 à 3000 mesures et un début d’insolation plus tard, nous abandonnons nos apprenties géomorphologues qui tout en nous aidant à mesurer les bâtiments nous ont aussi appris à compter en khmer. Retour sur Ta Keo. L’équipe est de nouveau réunie.

De jeunes aides de terrain

Du point de vue scientifique, le Ta Keo est une véritable offrande qui vaut bien quelques sacrifices (monter presque 70 kg de matériel chaque jour, jouer les équilibristes sur les marches trop étroites, jongler au-dessus du vide avec le scanner 3D – si, si Franck sait faire) : achevé sur le plan de la mégastructure, il n’a été que partiellement sculpté car abandonné brusquement pour des raisons en grande partie inconnue : de vieilles inscriptions évoqueraient la foudre s’abattant sur le temple et interprétées comme un mauvais présage ; autre hypothèse, plus pragmatique : la mort de son commanditaire et l’abandon pur et simple du chantier au profit d’un nouveau temple à construire… Résultat tangible, le temple présente dorénavant des interfaces rocheuses dont la mise en œuvre est variée : blocs grossièrement taillés, blocs polis, blocs épannelés (on distingue les traces d’outils du carrier) ; blocs moulurés (le profil des moulures est dessiné dans ses grandes lignes) ; blocs finement ciselés. Ces modénatures ont été levées minutieusement en 1967 par Jacques Dumarçay, architecte de l’École Française d’Extrême-Orient, et constituent aujourd’hui un état des lieux plus que précieux.
Il ne nous faut pas cacher notre admiration devant la perfection des levés de Dumarçay et nous imaginons aisément l’abnégation de carabin dont il a fait preuve pour les réaliser. C’est donc presque gênés que nous installons enfin notre matériel de cartographie, un scanner laser, qui une fois livré puis réglé, balayera seul, sous un soleil de plomb, les surfaces du temple et nous délivrera un paquet de 300.000 données par quart de mètre-carré, autant de coordonnées géographiques qui permettront de reconstituer en 3D et au dixième de millimètre près la géométrie du temple et de ces sculptures. Mais ne croyez pas que pendant que le scanner scanne, l’équipe se repose à l’ombre. Bien au contraire : la mesure laser est d’autant plus aisée que la luminosité environnante est basse (idéalement, inférieure à 500 lux), or en plein soleil la luminosité dépasse les 70000 lux ce qui rend l’appareil totalement aveugle… Puisque nous ne pouvons travailler de nuit (le site d’Angkor est normalement fermé et il est peu recommander d’y passer la nuit), il nous faut créer notre propre « obscurité » sur les parois à cartographier… Olivier et Franck se sont donc improvisés emballeurs de monuments déployant, tel Cristo sur le Pont-Neuf, de grandes bâches bleues et blanches qui permettent d’obscurcir les parois et rendent la visée laser possible.

Sous ces bâches, Olivier a installé son bureau (on envisage même de lui construire un couloir qu’il pourra traverser de manière inopinée, à la manière dont les Cambodgiens abordent les croisements en quelque sorte). Tel le colonel Kadhafi, Franck reçoit sous la tente et explique à qui veut la subtilité du scannage laser ; certaines touristes se montrent très intéressées, mais il faut très vite leur préciser que cela n’a rien à voir avec l’épilation laser…



La température est telle qu’un travail en petite tenue est de rigueur. Au bout de quatre jours de photogrammétrie et lasergrammétrie sur la même portion de gradin du temple, nos deux opérateurs commencent presque à se plaindre : « finalement, on aura passé notre temps sur le même boudin ».

Conciliabule sous la tente : comment bien aborder le boudin.


Évidemment, l’artifice vivement coloré déployé sur les parois du temple n’a pas manqué d’interloquer les autorités locales et ce sont gardiens du temple et policiers qui se succèdent les uns après les autres pour vérifier que nous disposons des autorisations nécessaires. La missive, écrite en khmer, que nous a fourni le directeur de l’autorité APSARA leur donne en tous les cas matière à discussion.


Ce travail de lasergrammétrie, comparé aux levés de 1967, est le premier qui permettra de quantifier la surface détruite par l’érosion en quarante ans. Mais il est surtout un état des lieux extrêmement précis qui va permettre de suivre l’évolution de ces surfaces dans les années à venir et d’y déceler la moindre nouvelle égratignure…
La journée a également été celle des interviews vidéo que nous réalisons pour un suivi documentaire du programme et l'occasion pour Marie-Francoise de terminer les relevés de météorisation entamés en 2006.



jeudi 7 février 2008

Des polaires sous les Tropiques

De prime abord, retrouver l’équipe polaire de GEOLAB au milieu de la jungle cambodgienne ne manque pas de piment (c’est donc en parfait accord avec la cuisine khmère). D’aucun crierait même à la faute de goût !
Et pourtant, il s’agit là d’une illustration que la recherche fondamentale – cette ogresse qui avalerait sans remords des crédits publics et ne produirait jamais rien de « rentable » –, cette recherche fondamentale, par essence gratuite et a priori inutile peut s’avérer, un jour, quasiment à l’insu de son plein gré, d’une utilité tout à coup éclatante. Pensez : il ne s’agit, ici, rien de moins que proposer des solutions pour conserver un des joyaux culturels du Patrimoine mondial de l’Humanité.
En effet, les techniques d’étude de la dégradation naturelle des fines sculptures khmères sur les temples en grès d’Angkor s’appuient sur des années de recherches menées, de 1979 à 2005, en milieux polaires et subpolaires, du Spitsberg à l’Islande, de la Laponie au Labrador, de l’Antarctique aux îles Féroé. Les méthodes de quantification des vitesses de destruction des roches et minéraux qui avait été mises au point pour des surfaces rocheuses polies et sculptées par le passage des glaciers sont désormais transférées à des surfaces rocheuses polies et sculptées par l’Homme… Certes l’agent qui a façonné la pierre diffère, les processus de destruction aussi, mais la façon de les aborder, les manières de rendre compte des modalités et des vitesses de destruction des dentelles de grès ou des pulpeuses Apsara par les agents atmosphériques et biologiques sont, quant à elles, bien les mêmes (on doit quand même avouer que les membres masculins de l’équipe semblent considérer avec davantage d’attention l’évolution des courbes des poitrines des danseuses célestes qu’ils ne le faisaient avec les dos de baleine* glaciaires des contrées boréales).
Des dos de baleine aux poitrines des Apsaras, les géomorphologues étudient les formes de relief...

Sans cette expérience préalable, les chercheurs en charge de la conservation des temples joueraient inévitablement aux apprentis sorciers avec ces trésors culturels ; ainsi, il y a quelques années, certaines équipes (soyons fair-play, ne les nommons pas) avaient proposé de protéger les temples en les recouvrant d’un vernis isolant… Mal leur en a pris : ce vernis contenant de la matière organique, il s’est avéré un lieu de résidence providentiel pour champignons et bactéries qui, recourant à de véritables guerres chimiques pour conquérir l’espace, ont détruit en quelques années, tout microbes qu’ils sont, l’écorce finement sculptée du temple millénaire. Une bonne dose de recherche fondamentale en amont aurait probablement permis d’éviter ce désastre scientifico-culturel…
Nous continuons notre travail en deux équipes parallèles ; Denis et moi continuons nos relevés colorimétriques, mais aujourd’hui, les enfants du Chau Say Tedovah nous ont observé toute la matinée, amusée par le flash du colorimètre, une compagnie avouons-le beaucoup plus agréable que celle des convois de touristes japonais qui nous demandent, eux, de nous pousser pour pouvoir prendre leurs myriades de photos…
En rentrant, jour férié oblige, l’unique porte de sortie d’Angkor Thom (de la largeur d’un car plus une paume de main de chaque côté) était prise d’assaut par une file de piétons, une de vélos, une de motos, une de tuk-tuk, une de voitures, une de 4x4 et une de cars, dans chaque sens évidemment ; comme si toute le circulation remontant et descendant les Champs-élysées s’acharnait à vouloir absolument passer, en alternance, sous l’Arc de triomphe. Bloqué près d’une demi-heure dans ce capharnaüm polluant, nous avons donc fait le plein de CO2 et de monoxyde carbone.
* Dans le langage géomorphologique, les dos de baleine sont des affleurements rocheux bombés sculptés par le passage des glaciers. Leur silhouette évoque celle des mammifères marins lorsqu’ils viennent respirer en surface.

mercredi 6 février 2008

Notre nouvel an chinois

Le Nouvel an chinois sera célébré toute la journée de demain, jeudi, mais les offrandes s’accumulent à l’entrée de notre hôtel depuis quelques jours déjà. Au retour du terrain, c’est un cochon bien gras et des poulets fumés qui trônent pour quelques heures encore devant la réception.




Les Cambodgiens étant d’une grande générosité, Franck et Olivier ont reçu d’autres offrandes avec un jour d’avance : au petit matin, cinq gros cartons les attendaient… eh oui, la station totale, le scanner 3D et le groupe électrogène sont parmi nous.


C'était pas sur ma liste au Père Noel...


Ah, ma station totale!


Bilan : ils ont passé presque onze heures sur le terrain à faire joujou avec le Ta keo.




Avec Denis, nous avons improvisé l’étude du Chau Say Tevodah, un temple à proximité du Ta Keo récemment restauré par les Chinois. Nous avons de quoi faire de nombreux calages chronologiques et l’étude colorimétrique s’avère très prometteuse. La philosophie de restauration chinoise est assez décriée car de nombreuses pierres ont remises à neuf et le temple, construit aux 11-12e siècles, dénote un peu dans le paysage passablement ruiniforme d’Angkor. Pourtant, on constate que dans certaines conditions des pierres taillées en 2004, 2005 voire même 2006 paraissent aussi vieilles que les pierres originelles si l’on se contente de les observer à quelques mètres de distance (ce que font 99,9% des visiteurs…).


Bibliothèque sud de Chau say tevodah restaurée en 2003
Bibliothèque nord de Chau say tevodah restaurée en 2006
Dans quelques années, il est fort probable que l’ensemble des bibliothèques, tours, sanctuaire et gopura auront retrouvé leur cachet d’antan. Au millième point mesuré dans la journée et au centième visiteur renseigné (« what are you doing to this temple build by the people of China ? » a-t-on même entendu de la part de visiteurs pékinois apparemment mal renseignés sur les frontières de leur pays d’origine), nous avons plié boutique.

L'utilisation du colorimètre : attention au risque d'entorse de l'index !

United Colors of Baphuon

Le Baphuon (prononcer : bapouonne) est un temple-montagne dont l’histoire aurait pu être écrite par les meilleures scénaristes d’Hollywood : grandeur, décadence, anéantissement puis résurrection ont jalonné les 1000 ans de cet édifice bâti à la gloire de Udayâdityavarman II. Comme tous les autres monuments angkoriens, le Baphuon a connu une « hibernation » sous couvert forestier de 5 siècles. Redécouvert au 19e siècle par les scientifiques de l’EFEO, l’édifice présentait de graves faiblesses structurales menaçant son maintien. En 1945, des éboulements furent observés. Une reconstruction par anastylose – une méthode ayant fait ses preuves ailleurs – fut décidée et les travaux commencèrent en 1961 sous la direction de Bernard-Philippe Groslier. Une à une, les pierres du Baphuon furent déposées et stockées dans la jungle environnante. Chaque pièce fut scrupuleusement numérotée et son emplacement consigné avec minutie dans des registres. Au début des années 1970, il ne restait à l’emplacement du Baphuon central que le tas de sable originel que les ingénieurs allaient faire habiller de béton afin de remonter le temple sur une assise solide. Indirectement, les Khmers rouges allaient en décider autrement : envahissant Phnom Penh, ils détruisirent dans la folie meurtrière qui les animaient les précieux cahiers de dépose. 300 000 pierres redevenues désormais anonymes se trouvaient ainsi éparpillées sur près de 10 ha dans la jungle.

Le plus grand puzzle du monde, en trois dimensions de surcroît, et avec des pièces pesant plusieurs dizaines de kilos chacune… On pensait le Baphuon perdu à jamais, d’autant que certaines pierres sculptées furent pillées. Mais les scientifiques de l’EFEO ne baissèrent pas les bras. En 1995, Pascal Royère décida de tenter le remontage du temple avec l’aide d’un programme informatique. Pari réussi ! Ce puzzle sera terminé courant 2009 et le Baphuon retrouve progressivement sa splendeur d’antan.



Quelques pièces du puzzle Baphuon


Mais que faisons-nous donc sur le Baphuon puisque c’est Ta Keo le cœur de notre programme ? N’allez pas croire que privés de matériel nous faisons du tourisme. Même si un tour de Bayon à dos d’éléphant fait très envie à Franck. Le grès, une fois extrait de la carrière sous forme de blocs quadrangulaires, se transforme sous l’action de tout un panel processus physiques, chimiques ou biologiques que l’on regroupe sous le terme de météorisation. L’épiderme rocheux est vivant : sa porosité se modifie, sa minéralogie se transforme, sa texture évolue. Un des signes éclatants de cette transformation est la couleur changeante de la pierre : une patine se forme et le grès, de verdâtre lorsqu’il est frais et sain, vire au brun orangé lorsqu’il est altéré ou à mesure que les limons ocre échappés de la latérite et importés par le vent viennent se fixer à sa surface. La vitesse d’acquisition de cette patine par les grès angkoriens n’est pas connue par les scientifiques. Or, ce paramètre serait un élément supplémentaire permettant d’estimer la vitesse de renouvellement de la surface du Ta Keo. L’intérêt du Baphuon surgit tout à coup : certaines pierres sont contemporaines (elles remplacent les pièces volées) et ont été placées à une date connue avec précision (deux périodes de restauration : entre 1965 et 1970 pour les bibliothèques ; depuis 1996 pour le temple lui-même). Nous pouvons donc observer la transformation progressive de ces pierres en comparant les plus récentes (celles que taillent sous nos yeux les ouvriers cambodgiens) avec celles placées précédemment.




Ceux qui travaillent assis au soleil surveillent ceux qui travaillent assis à l'ombre...


Pour qualifier objectivement la couleur de ces surfaces rocheuses, nous utilisons un spectrophotomètre. Nous dévoyons un appareil dont l’usage habituel se situe davantage dans l’industrie (couleur du papier, couleur de plastiques, couleur de peintures, couleur des fromages, etc.) ou le monde médical (suivi de cicatrisation par la couleur des cicatrices) qu’au milieu d’une jungle tropicale. Mais les géomorphologues ont l’habitude de ces détournements : le marteau Schmidt qu’utilisent les cimentiers pour mesurer la résistance des bétons a ainsi été recyclé dans la mesure de la résistance des roches (une mesure qui renseigne incidemment sur leur degré d’altération) voire même dans la datation de dépôt (morainiques par exemple).


Le spectrophotomètre est une lampe au xénon qui un émet un flash dans une sphère blanche percée. Le trou (d’un diamètre de 8 mm) à la base de la sphère est en contact avec la surface colorée. Lorsque le flash se déclenche, la surface de la roche est éclairée et renvoie la lumière. Un capteur situé au sommet de la sphère analyse instantanément ce signal retour et le transforme en une série de chiffres suivant un système de codage des couleurs (en l’occurrence, le CIE L*a*b* pour ceux qui veulent vraiment tout savoir). La mesure est a priori simple à réaliser, mais la nécessité de trouver des surfaces verticales et de dimensions correctes oblige à quelques acrobaties.


L’intérêt de cet appareil est de rendre la mesure objective et invariable d’un jour à l’autre ou d’un opérateur à l’autre : imaginez la qualité d’un débat scientifique entre un opérateur qui voit une surface rouge étrusque et son voisin qui ne démord pas du fait qu’elle est plutôt rouge Titien voire couleur cuir de Russie… encore plus si l’un des deux est daltonien… Au moins, désormais, nous ne pouvons qu’être d’accord. Même si la poésie en prend un sacré coup.

L’arlésienne « scanner 3D/ station totale » nous fait toujours passer par toutes les couleurs : ce matin, à 6h30 (oui, Raphaël : six heure trente !), alors que nous nous apprêtions à prendre le petit-déjeuner, un coup de fil nous apprend que le matériel pourrait être débloquer si nous obtenons l’accord écrit du directeur de l’Autorité APSARA, organisme en charge de la conservation du site d’Angkor. On imagine alors mal obtenir cela en moins de 24 heures, voire en moins d’une semaine. Une folle journée émaillée de coups de téléphone, fax, et autres emails commence pour Marie-Françoise. En attendant, Franck et Olivier entame la photogrammétrie système D, sans station totale, mais avec des repères faits maison. Le soir, un premier traitement rapide des données donne des résultats déjà encourageants. Les stratégies de perfectionnement émergent pour le lendemain. On sent que l’espoir renaît. 22 heures dernier coup de téléphone de la journée. On nous annonce que le matériel sera livré à l’hôtel dès 6h30 le lendemain matin. « Champagne ! » s’écrierait-on en temps normal. Ce sera plutôt une autre boisson à bulles, sans alcool, marron et très sucrée…